[Esprit de mon blog - Profession de foi]
- Bernard

- 29 mars
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 9 avr.
« Et quand il tombe amoureux fou
Y a pas de danger qu’il l’avoue :
Les effusions, dame, il déteste.
Selon lui, mettre en plein soleil
Son cœur ou son cul c’est pareil,
C’est un modeste. »
Georges Brassens, Le Modeste, 1976
L’exergue, à lui seul, parle déjà : avant tout, il convient de définir, en même temps que ce qu’il ambitionne, ce que ce blog ne voudrait pas être, à savoir un exutoire, un déversoir de l’intimité, une poubelle d’états psychiques ! Il ne sera donc un tri sélectif ni de ma quotidienneté ni de mes affects, auxquels répondraient ceux d’interlocuteurs et d’interlocutrices esseulé(e)s. Il se voudrait un simple reflet de mes textes, de mes opinions et de mes pistes de recherche, appelant, dans l’interaction souhaitée avec autrui, assentiments et/ou contradictions. Cela dans une décence qui implique un contrôle de ma part pour éliminer, autant chez moi-même que chez mes intergraphiteurs tout message trivial ou émanant de débordements d’humeur politiques ou idéologiques. Autrement dit, selon la formule de Michel Tournier, je souhaiterais produire un journal « extime » qui fût une source d’échanges, mais à condition de donner une juste acception à ce néologisme, à le bien distinguer du journal intime public ou d’une prétentieuse autobiographie dont l’avatar à éviter de première urgence est l’égocentrisme rousseauiste ou toute autre forme de nombrilisme de même farine.
C’est dans cet esprit que je proposerai, non seulement des critiques de films, de musique, d’expositions, d’œuvres diverses, ou encore des réactions par rapport à l’actualité, mais aussi des inédits déjà rédigés (articles, recensions, commentaires de textes d’auteurs, romans, nouvelles, comédies, poésie, chansons…) sonnant le glas d’éditeurs dont la frilosité ou l’incompétence s’excuse dès l’abord en se cachant derrière des formules toutes faites. Désolé, donc, de « ne pas entrer dans le cadre de leurs collections », et de préférer désormais, à la façon des écolos, le circuit court, sans intermédiaires, destiné à un lecteur bénévole dont la critique, que j’espère assortie de ses propres textes, sera désintéressée et sincère - ladite critique fût-elle négative, ce dont, à l’avance, je me réjouis autant que des billets de sympathie.
Dans cette éthique pourra donc aussi s’élaborer une dimension universitaire, sans pour autant qu’elle sacrifie au jargon ou à la pédanterie. Puisse ainsi ce blog servir, notamment, de tremplin à une conversation humblement scientifique, à une sorte de séminaire permanent laissant place aux spéculations, aux hypothèses, et jusqu’aux erreurs fécondes. Tout cela dans une recherche de simplification, et non de complexification. Puisse ce blog être ainsi une vulgarisation, dans le bon sens du terme. Bref, un échange à la fois riche et modeste au sein d’un ensemble qui pourrait être défini comme un blog littéraire, axé sur l’actualité culturelle et sur une réflexion dont les cibles principales seront le monde des idées, de la littérature, et de la langue qui les véhicule.
Pari un peu téméraire, voire gageure, dans la mesure où les limites ainsi fixées risquent à tout moment d’être facilement et fragilement dépassées, ne serait-ce, par exemple, qu’à travers ma présentation personnelle, rédigée, elle, dans le seul dessein de me faire mieux connaître et qui, pour obvier à tout débordement, s’efforcera, si tant est que je la rédige, de ne pas s’éloigner du curriculum vitae !
Mais les choses ne sont peut-être pas toujours aussi simples. Imaginons, par exemple, que je décide d’éditer dans ce blog un ensemble de textes intitulé Odeurs.
Je m’explique : j’avais écrit ces quelques chapitres à la suite de visites chez l’orthophoniste qui soignait plusieurs manifestations de ma maladie de Parkinson, parmi lesquelles l’anosmie. Connaissant mon vice impuni, l’écriture, la praticienne me conseilla alors de rédiger des petits textes mettant en scène des expériences olfactives vécues afin que mon cerveau se ressouvienne et stimule ainsi en retour le sens en défaut. Ce que je fis. Et qui réussit ! Mais cette prose, mettant ainsi en scène des séquences de ma vie, et le plus souvent de ma petite enfance, ne trahirait-elle pas alors le contrat ? Devrais-je donc passer cette production sous silence, alors que ce témoignage, sur le plan scientifique, pourrait peut-être servir à d’autres patients ? D’autre part, cet aspect vertueux de mon blog n’est-il pas souligné et renforcé par la présence de deux préfaces explicatives qui inaugurent ces sortes de poèmes en prose, l’une de ma main, l’autre de celle de l’orthophoniste ? De façon quelque peu jésuitique, je pourrais ainsi alléguer pour ma défense que ces flashs issus de mes premiers pas ne sont pas présentés sur la toile pour quelque louche autosatisfaction, mais avant tout pour faire avancer le partage et l’avancée de connaissances… D’autant que, dans les commentaires qui pourront m’être adressés, je ne manquerai sans doute pas de découvrir d’autres aspects du problème, d’autres témoignages de malades. Autant d’éléments qui répondent à l’esprit de ce blog.
Dans un premier essai d’installation d’un site personnel (voué à l’échec eu égard à mon incompétence en matière informatique) j’avais donné comme premier titre à ce site Neige de Gien. Tout simplement parce que ce palindrome était sorti, un soir de 1979, de l’inspiration rêveuse de mon paternel qui attendait le train à la gare de Gien. Paternel à qui je rendrai également ici, de loin en loin, un sincère hommage à travers les écrits de sa plume, que je vous livrerai et éventuellement commenterai. Tout comme j’évoquerai la rare mais non moins exquise prose de ma mère, insoupçonnée de ceux qui l’ont côtoyée et aimée.
Rétif à la grammaire de l’électronique, j’ai donc renoncé à Neige de Gien en faveur du présent site qui devient ainsi, pour éviter toute interférence avec mon premier essai infructueux, Blogue à part. J’espère dès lors m’y retrouver – techniquement parlant s’entend, mais demeurons prudent dans ce contexte difficultueux ne soyez pas étonnés si le nom de mon site (ou de mon blog, je ne sais) change encore plusieurs fois... Et merci aux bonnes âmes qui m’ont prêté leur aide pour cet âpre chemin d’une modernité à double tranchant !
Dernière aporie à propos des problématiques limites naguère évoquées : le garde-fou érigé par le seul respect humain n’est-il pas en même temps un paradoxe, dans la mesure où je n’ai de cesse de dénoncer tout interdit ? Au point d’avoir imaginé dans certaines fictions un « Ministère des Interdits », reflet fictionnel d’une époque où l’on se lève le matin avec, à chaque fois, une liberté en moins…
Tout l’art, tel celui d’un ski nautique de l’esprit, consistera donc sans doute à demeurer savamment sur la crête de la vague, entre l’impersonnalité jamais atteinte et la confession redoutée… Art par essence imparfait, sinon impossible, tant il est évident que le degré zéro de l’ego n’existe pas !
L’essentiel étant dit, commençons ensemble cette belle aventure ! Et à l’avance : merci !




Commentaires